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Non, dit Marie, c’est sale. Il y avait une fille, Mélanie :

— Monsieur pourrait peut-être élever des poules.

— À la bonne heure ! dit Henry.

Ni vaches, ni cochons, ni poules, Marie ne tenait à aucune sorte de ces bêtes :

— Oui, dit Marie.

Il y a des « oui », Seigneur, on voudrait croire en vous et les offrir comme un calice chargé de larmes… Oui !… On a beau n’être qu’une Marie, tantôt servante, tantôt putain, maintenant l’épouse, on a vécu à Londres, à Bruxelles et l’on sait bien, ce sont des villes. La ville : on voit des boulevards, des maisons dont on pense : « Mon Dieu, comme ces maisons sont belles ! » des voitures dont on dit : « Il est amusant, leur bruit ! » La ville : on coud, on ouvre sa fenêtre et voici venir de la joie de tous ces gens qui passent. La ville : ce chapeau à vingt-cinq francs cinquante que l’on se paierait, si l’on avait des sous. La ville : autrefois on allait au restaurant, on allait au théâtre, on allait… vous savez bien, le bal où, certaine nuit, on a fait la folle. Maintenant on ne ferait plus la folle, à ces fêtes, on n’irait plus, mais on vit tout près, on s’amuse à songer que d’autres s’y amusent. La ville : c’est encore la cousine qui vous arrive, Mère qui le pourrait, parce que jusqu’à la ville il vient des trains. La ville : les trottoirs sont propres, les chambres en ordre, les messieurs prévenants. La ville devient à certains jours la campagne qui, alors, semble bonne parce qu’on s’y repose et que, le soir, on la quitte.