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Pour sa barbe, il avait emprunté le rasoir d’Henry : « Bon rasoir, Henry, bon rasoir » et s’en flanquait, plein les joues, de coupures. Pouah ! du sang de cuistre dans du savon qui bave !

Ah ! voilà qu’on arrivait à Forest. Il regarda le cimetière : il aperçut son ancienne chambre. Autrefois habitait là un type, Henry Boulant, vous savez, un type à rire aux gens qui pleurent derrière un corbillard. Qui vivait là maintenant ? Quelqu’un avait ouvert la fenêtre. Pas Henry Boulant. Henry Boulant se mariait. Quand on se marie, plus jamais on n’ouvrira la fenêtre de sa chambre où vont les corbillards. On est son propre corbillard.

Il passa des hommes, des hommes d’ici qui le connaissaient maintenant :

— Toutes mes félicitations, Monsieur Boulant…

Mais non, mais non : on ne félicite pas M. Boulant qui fait comme tout le monde.

Ils arrivèrent à l’hôtel de ville. Henry Boulant ou non, c’est là qu’on entre. Il entendit :

— Chéri, prends garde aux marches.

— Merci, Marie, toi, du moins…

Mais les autres, que faisaient-ils là, les autres ? Il y en avait plein dans cette salle : des femmes, des moutards et, avec tout ce qu’elles traînent à leur suite, deux noces, deux futures à fleurs, deux bonshommes à gants clairs et, au milieu, lui troisième, Henry Boulant, qui attendrait son tour. Pas même seul, entendez-vous ? Comme les autres, parmi les autres.

Et pourquoi ne commençait-on pas ? L’échevin, on attendait l’échevin ! Ah oui, le grand personnage qui a son mot à dire quand on agit