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pour en retirer que l’on a mis ses deux mille francs dans une Caisse d’Épargne ?

Elle était heureuse, maman, avec son gosse, femme aussi avec l’homme. On a vu d’autres bonheurs ; des bonheurs avec des barbes, des bonheurs à l’eau de Cologne ; celui-ci le meilleur, on ne voudrait pas qu’il parte. Alors on rêve. Le mariage serait beau. On appartient à un homme, tous le savent. On porte, pour qu’ils le sachent, à son doigt, l’alliance. En course, en tram, ils la voient. Ils disent : « Fichtre, voilà une dame mariée, on voit son alliance ! » Elle avait toujours aimé les alliances.

— Rien ne t’empêche, suggérait Henry.

Mais, sans le mariage, l’alliance est un bijou faux. Et puis. Mère, qui serait contente, et cette brave Mme  Dombrain, toujours à s’informer : « Eh bien ? cela marche-t-il avec l’artiste ? » Et sans parler de ceux-là, savoir en son cœur que l’on est l’un à l’autre, que c’est pour toujours !

Henry riait :

— Hum !… Le mariage, on est Monsieur, on est Madame. Le dimanche on se promène au Bois ; pas dans les sentiers, tu sais ; le long des avenues où vont les autres « Monsieur et Madame ». On a bébé, pipi-caca, dans sa voiture. C’est bête !… c’est idiot : on est comme tout le monde.

— Tu as raison, en somme.

Pendant huit jours elle oubliait de penser au mariage.

Il vint un mois avec un seize pour payer une note et passer par la Caisse d’Épargne. Henry se consolait : « Quand j’aurai ma place… »