Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/436

Cette page n’a pas encore été corrigée

livre pouvoit être bonne, quoiqu’en la considérant séparément il ne pût la regarder comme une bonne piéce à cause de l’aigreur de ses termes, et du peu de liaison qu’il avoit trouvé dans son raisonnement.

Quand au jugement qu’il fit de la géostatique aprés l’avoir lûë, il se vid obligé de l’envoyer au P Mersenne, tant pour la satisfaction de ce pére que pour celle de M Des Argues, à qui il n’étoit plus en état de rien refuser. C’est ce qu’il fit peu de jours aprés dans une lettre qu’il en écrivit à ce pére en ces termes. Quoique les fautes qui se trouvent dans l’écrit de la géostatique soient si grossiéres qu’elles ne puissent surprendre personne, et que pour ce sujet elles méritent plûtôt d’être méprisées que contredites : néanmoins, puisque vous desirez en sçavoir mon opinion, je la mettray icy en peu de mots.

Je n’ay trouvé dans tout ce beau livre in folio

qu’une seule proposition, quoique l’auteur en conte treize. Car pour les trois prémiéres et la dixiéme, ce ne sont que des choses de géométrie si faciles et si communes qu’on ne sçauroit entendre les elémens d’Euclide sans les sçavoir. Les V, Vi, Vii, Viii, Ix, et Ximes ne sont que des suites, ou des répétitions de la quatriéme ; et elles ne peuvent être vrayes, si elle ne l’est. Pour la Vii, la Xii, et la Xiiime il est vray qu’elles ne dépendent pas ainsi de cette quatriéme : mais parce que l’auteur s’en sert pour tâcher de les prouver, et même qu’il ne se sert pour cela que d’elle seule, et que d’ailleurs elles ne sont non plus que les autres d’aucune importance, elles ne doivent point être contées. De sorte qu’il ne reste que la quatriéme toute seule à considérer : et elle a déja été si bien réfutée par M De La Brosse qu’il n’est pas besoin d’y rien ajoûter. Car de cinq ou six fautes qu’il y remarque, la moindre est suffisante pour faire voir que le raisonnement de cét auteur ne vaut rien du tout. J’ay eu grand tort l’année passée en voyant cette réfutation de M De La Brosse, sans avoir vû le livre qu’il réfutoit, de ne la pas approuver. Mais la seule raison qui m’en empécha, fut que je ne pouvois m’imaginer que les choses qu’il reprenoit fussent si absurdes qu’il les représentoit : et je me persuadois qu’il exaggéroit seulement quelques omissions, ou des fautes