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peine qu’un homme du mérite et du rang de M De Fermat se broüillât si mal à propos avec M Descartes, songeoient aux moiens de les réconcilier et de changer leur dispute en une correspondance parfaite, dont les fruits se pussent goûter dans une communication mutuelle de leurs lumiéres. Ils en parlérent au P Mersenne, qui en écrivit à M Descartes avant même qu’il en eût reçû la derniére réponse au second écrit des deux amis de M De Fermat.

M Descartes ne dissimula point à ce pére que cette proposition luy étoit trés-agréable, et il luy en récrivit en ces termes dans le têms même que M De Fermat luy demandoit son amitié par la médiation du même pére, sans qu’il sçût encore rien de sa disposition. Pour ce que vous ajoutez, dit-il, que ces messieurs qui ont pris connoissance de nôtre entretien ont envie de nous rendre amis M De Fermat et moy, vous les assurerez, s’il vous plaît, qu’il n’y a personne au monde qui recherche ni qui chérisse l’amitié des honnêtes gens plus que je fais ; et que je ne crois pas que M De Fermat puisse me sçavoir mauvais gré de ce que j’ay dit franchement mon opinion de son écrit, aprés m’y avoir provoqué en galant homme. Rien n’est plus contraire à mon humeur que de reprendre les autres : mais je ne pouvois éviter cette occasion aprés son défi, sinon en le méprisant : ce qui l’auroit sans doute plus offensé que ma réponse. Il écrivit en même têms à M Mydorge et à M Hardi, pour les remercier de la bonté avec laquelle ils avoient soutenu son parti touchant la régle de maximis de M De Fermat, et du tour heureux qu’ils avoient donné à cette dispute pour la terminer à son avantage et au gré des deux parties.

M De Fermat en faisant ces démarches vers M Descartes ne se considéroit pas comme un homme vaincu et desarmé qui n’auroit eu de ressource que dans la clémence du victorieux. Et M Descartes de son côté regardoit la demande que M De Fermat luy faisoit de son amitié comme un fruit, non de sa victoire, mais d’une paix qui étoit également glorieuse et utile à tous les deux. Quoique leur paix se fist sans conditions, M De Fermat qui ne croyoit pas devoir négliger les choses qui pouvoient servir à sa justification, écrivit au P Mersenne pour luy marquer qu’il avoit été trompé