Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/403

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il n’en usa pas de même à l’égard de son écrit de maximis et minimis , c’est-à-dire, des plus grandes et des moindres de toutes les quantitez, sous prétexte que c’étoit un conseiller de ses amis, et non M De Fermat luy-même qui l’avoit donné à ce pére pour le luy envoyer. J’ay cru, dit-il dans sa lettre à ce pére, que je devois retenir l’original de cet écrit, et me contenter de vous en envoyer une copie, vû principalement qu’il contient des fautes qui sont si apparentes, qu’il m’accuseroit peut-être de les avoir supposées, si je ne retenois sa main pour m’en défendre. En effet, selon que j’ay pû juger par ce que j’ay vû de luy, c’est un esprit vif, plein d’invention et de hardiesse, qui s’est à mon avis précipité un peu trop, et qui ayant acquis tout d’un coup la réputation de sçavoir beaucoup en algébre pour en avoir peut-être été loüé par des personnes qui ne prenoient pas la peine, ou qui n’étoient pas capables d’en juger, est devenu si hardy, qu’il n’apporte pas, ce me semble, toute l’attention qu’il faudroit à ce qu’il fait.

M Descartes accompagna cette lettre de la réponse qu’il avoit faite au traité de M De Fermat de maximis et minimis , et il manda au P Mersenne qu’il seroit fort aise de sçavoir ce que cét auteur diroit tant de cette réponse que de celle qu’il luy avoit addressée auparavant touchant les objections où la démonstration contre sa dioptrique. Il est vray que l’une et l’autre réponse sembloient n’être que pour le P Mersenne, si l’on s’en rapporte à leur addresse : mais M Descartes auroit été trés-fâché que M De Fermat ne les eût pas vûës. Il pria donc ce pére de les luy envoyer incessamment, ajoûtant qu’il n’avoit pas voulu y nommer M De Fermat, afin qu’il eût moins de confusion des fautes qu’il avoit été engagé d’y remarquer, non dans le dessein de rien faire qui fût choquant ou des-agréable à M De Fermat, mais seulement de se deffendre.

Et parce, dit-il, que M De Fermat pourroit se vanter à mon préjudice dans ses écrits ou dans ses discours, je crois qu’il est à propos que plusieurs voyent aussi mes deffenses. C’est pourquoy je vous prie de ne les luy point envoyer sans en retenir copie. Que s’il vous parle de vous envoyer encore d’autres écrits pour me les faire voir, priez-le, s’il vous plaît,