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le vanger de la négligence de M De Balzac, ou d’inventer des raisons propres à l’excuser. M Descartes prit ce second parti dans la réponse qu’il fit à M De Zuytlichem. Il voulut luy faire croire que M De Balzac, amateur comme il étoit de la liberté, n’avoit pû sans doute se persuader qu’il y eût des liens au monde qui fussent si doux, qu’on ne pût en être délivré sans les regréter. Mais qu’au reste il étoit des plus constans dans ses amitiez, encore qu’il ne fût pas toûjours des plus diligens à le faire connoître par ses lettres.

M Descartes et M De Zuytlichem firent en cette année là perte d’un autre ami commun, qui étoit Laurent Realius ou Monsieur Reael. Il avoit eu les prémiers emplois sur la flote et dans les Indes pour les hollandois. Il passoit pour le prémier homme du siécle dans la philosophie magnétique

et Gilbert

ny Cabeus n’avoient rien à luy apprendre sur ce sujet.

Il possédoit parfaitement la navigation, et il n’étoit guéres moins versé dans le reste des mathématiques.

Cependant la lecture du livre de M Descartes commençoit à produire ses effets selon la différente disposition des esprits. Il se trouva peu de choses dans tout ce qu’il avoit écrit, qui ne parût douteux pour les uns et nouveau pour les autres. Les vrais sçavans ne furent pas effrayez de ce qu’il y avoit de nouveau, et qui ne pouvoit rendre M Descartes odieux qu’à ceux qui étoient entêtez de leurs préjugez : mais ils prirent occasion de ce qui leur paroissoit douteux, pour se préparer à luy faire des objections selon qu’il leur avoit fait témoigner qu’il le souhaitoit pour procurer de plus grands éclaircissemens à la vérité.

M Mydorge son ami auroit été des plus propres à cela, s’il ne s’étoit déja trouvé par avance de même sentiment que luy dans plusieurs choses dés le têms qu’ils se voyoient à Paris. Il auroit pû du moins luy proposer des difficultez sur divers endroits du discours sixiéme de la dioptrique, où M Descartes traite de la vision d’une maniére différente de celle dont il avoit coûtume d’expliquer luy-même cette matiére. Mais il se contenta d’en parler au P Mersenne, qui ne tarda point d’en écrire à M Descartes ; et de luy témoigner que M Mydorge ayant lû sa géométrie auroit souhaité voir sa vieille algébre