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roit dire que tout ce que les inquisiteurs de Rome ont décidé, n’est pas incontinent un article de foy pour cela, et qu’il faut prémiérement que le concile y ait passé. Mais je ne suis point si amoureux de mes pensées, que de vouloir me servir de telles exceptions, pour avoir le moyen de les maintenir. Le desir que j’ay de vivre en repos, et de continuer la vie cachée que j’ay commençée, fait que je suis plus content de me voir délivré de la crainte que j’avois d’acquerir plus de connoissances que je ne désire par le moyen de mon écrit, que je ne suis faché d’avoir perdu le têms et la peine que j’ay employée à le composer. Je n’ay jamais eu l’humeur portée à faire des livres : et si je ne m’étois engagé de promesse envers vous et quelques autres de mes amis, dans la pensée que le desir de vous tenir parole m’obligeroit d’autant plus à étudier, jamais je n’en serois venu à bout. Aprés tout, je suis assuré que vous ne m’envoieriez point de sergent pour me contraindre à m’acquiter de ma dette ; et vous serez peut-être bien-aise d’être exemt de la peine de lire de mauvaises choses. Il y a déja tant d’opinions en philosophie qui ont de l’apparence, et qui peuvent étre soutenuës dans les disputes, que si les miennes n’ont rien de plus certain, et si elles ne peuvent êtres approuvées sans controverse, je ne les veux jamais publier. Toutesfois parce que j’aurois mauvaise grace, si, aprés vous avoir tout promis et si long-têms, je pensois ne vous payer qu’en défaites : je ne laisserai donc pas de vous faire voir ce que j’ay fait le plûtôt que je pourray : mais je vous demande encore s’il vous plaît un an de delay pour le revoir et le polir. Vous m’avez averti du mot d’Horace, (…), et il n’y en a encore que trois que j’ay commençé ce traitté.