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déja arrivé depuis deux mois que je n’ay avancé de rien dans mon traitté du monde , que je ne laisserai pourtant pas d’achever avant le terme que je vous ay mandé.


Le terme que M Descartes s’étoit prescrit pour achever son traitté du monde, étoit le têms de pâques de l’an 1633 : et malgré la résolution qu’il avoit prise deux ou trois ans auparavant de ne rien mettre au jour, il s’étoit laissé aller aux instances du Pére Mersenne et de ses autres amis de Paris, à qui il faisoit espérer de le faire imprimer pour les étreines de l’an 1634. Mais le desir d’apprendre de plus en plus, et l’espérance de découvrir de jour en jour quelque chose de nouveau l’empêchérent de finir pour pâques : et il manda au P Mersenne, que s’il différoit à s’acquiter de sa dette, c’étoit avec intention de lui en payer l’intérêt. Ce qui le retarda fut la délibération de sçavoir s’il y décriroit la maniére dont se fait la génération des animaux. Il se résolut enfin de n’en rien faire, parce que cela le tiendroit trop long-têms. De sorte qu’ayant achevé tout ce qu’il avoit dessein d’y mettre touchant les corps inanimez, il ne lui restoit plus qu’à y ajoûter quelque chose touchant la nature de l’homme : aprés quoi il devoit le mettre au net, et l’envoyer au Pére Mersenne. Mais il voulut le laisser reposer pendant quelques mois, afin de pouvoir mieux connoître ses fautes, et d’y ajouter ce qui lui seroit échappé.

On peut dire que ce traitté qu’il appelloit son monde , parce que c’étoit l’idée d’un monde qu’il avoit imaginé sur celui où nous vivons, renfermoit toute sa physique en abrégé. Il avoit eu dessein d’y comprendre tout ce qu’il croioit sçavoir avant que de l’écrire touchant la nature des choses