Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/258

Cette page n’a pas encore été corrigée

appartement. Mais voyant que le Sieur Ferrier ne venoit pas, il disposa ses affaires d’une autre maniére : de sorte qu’il quitta la Frise pour venir demeurer dans Amsterdam vers le commençement d’octobre.

Il ne laissa point de servir le Sieur Ferrier avec son affection ordinaire, et il luy en donna de nouvelles marques dés la prémiére semaine de son établissement à Amsterdam. Ferrier luy avoit écrit vers la fin de juillet ou le commençement d’août, pour luy faire sçavoir l’espérance qu’on luy avoit donnée de pouvoir travailler pour le roy. M Descartes pour luy faciliter les moyens d’avancer cette affaire, l’avoit recommandé aux péres de l’oratoire, dont la plûpart étoient ses amis particuliers. La chose réussissoit déja au gré de l’un et de l’autre, lors que la mort du Cardinal De Bérulle, vint à rompre les mesures qui s’étoient prises sous sa protection.

Ferrier ne manqua pas d’en récrire sur l’heure à M Descartes, et il tacha de luy faire sentir combien cét accident faisoit de tort à ses intérets particuliérs. M Descartes n’y fut pas insensible, et il luy fit connoître par la lettre qu’il luy écrivit d’Amsterdam le huitiéme d’octobre combien il auroit souhaité que la fortune luy eût été plus favorable. Il luy manda qu’il ne devoit pas encore desespérer de pouvoir se loger au Louvre, nonobstant l’absence du Pére De Gondren qui devoit succeder au Cardinal De Bérulle dans la supériorité générale de sa congrégation. Il luy donna même avis d’aller trouver le Pére Gibieuf ou le Pére De Sancy, s’il venoit quelque place à vacquer avant le retour du Pére De Gondren, et de les engager par ses importunitez à luy garantir ce que l’un de leurs péres, luy avoit fait obtenir. Ferrier qui à la recommandation de M Descartes et de M Mydorge s’étoit donné de l’accez chez les sçavans, et chez les grands même, étoit tombé insensiblement dans la négligence par un peu trop de complaisance pour luy même. M Descartes s’en apperçût, et sans vouloir aller jusqu’à la cause, il luy conseilla d’emploier le têms présent, sans trop se fier sur l’avenir : et il luy dit nettement qu’il n’avanceroit jamais, s’il différoit toujours de trois mois en trois mois jusqu’à ce que ses affaires domestiques fussent en meilleur état. Il luy donna encore d’autres avis particuliérs sur divers