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la route que sa lumiére nous trace.

Voila une partie des motifs qui le portérent à renoncer aux mathématiques vulgaires. Mais il paroît que le respect qu’il témoignoit pour les anciens l’empêcha de pousser le mépris qu’il faisoit de ces sciences dans la maniére de les cultiver ou de les enseigner.

Car venant à faire réfléxion sur la conduite des anciens philosophes, qui ne vouloient recevoir personne dans leurs ecoles qui ne sçût les mathématiques, et particuliérement la géométrie, comme si cette science leur eût paru la plus aisée et la plus nécessaire de toutes pour préparer leurs esprits à la philosophie : il aima mieux croire que ces anciens avoient une science de mathématique toute différente de celle qui s’enseignoit de son têms, que de les confondre parmi les modernes dans le jugement qu’il en faisoit. Le préjugé où il pouvoit être en faveur de ces anciens n’alloit pourtant pas jusqu’à lui persuader qu’ils eussent une connoissance parfaite des mathématiques. Les réjouïssances demesurées, et les sacrifices qu’ils faisoient pour les moindres découvertes étoient des témoignages du peu de progrés qu’ils y avoient encore fait, et de la grossiéreté de leur siécle dont ils n’étoient pas éxemts. L’invention de certaines machines que quelques historiens ont relevées avec tant d’éloges et d’ostentation contribuoit encore à le confirmer dans cette pensée : supposant que toutes simples et toutes faciles qu’elles étoient, il suffisoit qu’elles fussent nouvelles et inconnuës au vulgaire pour attirer l’admiration publique.

Les prémiéres semences de vérité, que la nature à mises dans l’esprit de l’homme, qui nous font corriger encore tous les jours nos erreurs par la lecture ou la conversation, et qui avoient tant de force dans l’esprit de ces anciens dont le fonds étoit peut-être mieux préparé que le nôtre, ont pû produire, selon M Descartes, des effets assez grands dans ces prémiers philosophes, pour leur donner les véritables idées de la philosophie et des mathématiques : quoi qu’ils n’en pussent point encore avoir une connoissance parfaite, et qu’ils n’eussent pas toute la politesse des siécles posterieurs. Il appercevoit quelques traces de la véritable mathématique