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Un dimanche soir, après la soupe, on sonna à cheval et toute l’École sortit de Saumur en prenant par le pont Fouchard les routes de Doué et d’Angers.

Je me souviens que le général Crespin, qui surveillait notre départ, recommandait à notre capitaine, en lui signalant un passage rendu difficile par l’inondation, de nous compter avant et de nous recompter après.

Rien n’était triste comme la ville plongée dans l’obscurité, par suite de l’immersion de l’usine à gaz, et cette colonne de cavalerie traversant en silence les rues éclairées par les seules lumières que tenaient les habitants en entr’ouvrant curieusement leurs fenêtres.

Le silence n’était troublé que par les tambours des pompiers battant la générale. Ils avaient cette fois à combattre un fléau cent fois plus terrible que le feu, et je suis encore à me demander en quoi leur réunion pouvait le conjurer. Après avoir traversé le pont Fouchard, nous gagnâmes les collines qui avoisinent Saumur. De là, on découvrait, par un clair de lune superbe, toute l’horreur de l’inondation s’étendant à perte de vue. Ce spectacle saisissant ne sortira jamais de ma mémoire.

Mon escadron alla coucher dans un village ap-