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ment me rappelait trop le collège. De plus, la théorie qu’il fallait apprendre alors littéralement était mon cauchemar. Ce littéral ! combien sont arrivés, grâce à lui, aux plus hautes situations militaires sans autre mérite qu’une mémoire exceptionnelle. L’anecdote suivante était légendaire à l’École : un général inspecteur demandait à l’examen de sortie, à un élève, quel était le mot qui ne se trouvait qu’une fois dans la théorie.

Tout le monde reste stupéfait et bouche bée à cette question inattendue. Alors le général se rengorgeant : « C’est le mot nonobstant à l’article II de l’école d’escadron, telle page, tel paragraphe qui est ainsi conçu : « Lorsque la marche oblique doit s’exécuter du côté opposé au guide, les serre-files conservent leur place nonobstant le changement de guide. » Et l’inspecteur ajoutait : « Vous voyez bien que vous ne savez pas votre théorie. »

Voilà où l’on en était arrivé avec ce culte exagéré du mot à mot.

Par contre, aujourd’hui où l’on n’est plus obligé d’apprendre la théorie littéralement, les paresseux la lisent à peine et les inintelligents qui la lisent toute la journée sont incapables de l’expliquer à leurs recrues. Bien entendu, je parle là pour les cadres inférieurs.