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« le vin étant tiré il ne restait plus qu’à le boire ».

Ma première garde me frappa beaucoup et je me livrai à de nombreuses réflexions en regardant le maréchal des logis qui commandait le poste. C’était un de ces vieux sous-officiers chevronnés, la poitrine couverte de médailles, comme il y en avait tant dans la Garde. Sa figure distinguée et sa façon de s’exprimer indiquaient un homme ayant reçu une éducation et une instruction soignées. Quelles avaient été les raisons qui l’avaient empêché de dépasser son modeste grade ? Je l’ignorais.

Plus je le considérais, tristement accoudé sur la table grossière du corps de garde, éclairé par une méchante lampe, plus les vers d’un de ses collègues du 2e cuirassiers de la Garde, poète à ses moments perdus, me revenaient à la mémoire.

Teissonnier, c’est le nom du poète en question, a écrit entre autres choses, dans un recueil charmant, intitulé Poésies légères, cette pièce de vers : Le corps de garde. Un vieux maréchal des logis, c’est sans doute lui que l’auteur a voulu peindre, appuyé aussi sur la table du poste, laisse errer son esprit romantique et le reporte au temps charmant de la jeunesse. Il rêve fleurs, femmes,