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tout ce que savent les grandes personnes, tandis que, dans son milieu, il ne pouvait plus rien étudier sans s’isoler davantage… Là-bas, il s’instruirait non seulement à l’école, mais encore dans la rue, par les journaux, les affiches, en ouvrant seulement les yeux, même en respirant : chaque bouffée d’air serait pleine de pollens invisibles pour féconder son cerveau !

Il souffrit du mal de mer, et quitta peu sa cabine. Son compagnon, un marchand, gros bonhomme aux lèvres si épaisses qu’il semblait toujours rester bouche bée, causa souvent avec lui ; il lui répétait que les minorités juive et canadienne-française ont intérêt à s’unir contre la majorité anglo-saxonne. Boureil reçut la visite d’un Français qui colportait sur les passagers toutes sortes de potins et de médisances. Ainsi, au lieu de dresser les uns contre les autres, il les rapprochait. Il en résulta bientôt une