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courbe fuyant à partir du bout du nez. C’est à eux que Berlital s’adressait le plus volontiers. Madeleine leur jetait des regards contempteurs que Boureil interprétait à envie.

Puis le silence s’établit, le concert commença. Les élèves, une vingtaine, jouèrent à tour de rôle. Ce fut bruyant et lamentable. Une équipe de fourmis besognant à remettre sur pied un monument en marbre. Et l’auditoire applaudissait beaucoup, parce qu’il lui pesait de garder le silence.

Madeleine retint son compagnon et, les autres partis, demanda à son oncle de jouer lui-même. Berlital se fit un peu prier, puis il s’assit sur le banc. D’abord il se racla la gorge comme un chanteur, et posant ses deux paumes sur le clavier comme sur le bord d’une fenêtre, la tête en avant, il cligna plusieurs fois les yeux pour percer la brume étendue sur son monde intérieur. Il sourit enfin à une vision paradisiaque. De ses deux