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cet aspect, de maîtresse de maison malgache dans une case en paillote, avec, pour tout personnel, deux ou trois négresses habillées à peu près uniquement de leurs cheveux graisseux, et quelques négrillons dévorés de vermine ! »

Mais Michel avait beau railler, l’idée du départ ne quittait plus son esprit. Quel soulagement s’il pouvait rompre pour toujours avec les tracas qui le poursuivaient depuis si longtemps et recommencer sa vie dans des conditions toutes nouvelles ! La bonne grâce avec laquelle sa femme envisageait la perspective de ce changement radical d’existence avait donné comme un coup de fouet à son irrésolution. Se montrerait-il moins courageux qu’elle ?

A force d’y penser, cette expatriation, qui tout d’abord lui avait paru absurde, commençait à prendre à ses yeux des couleurs plus acceptables. Après tout, pourquoi ce qui avait réussi à son oncle et à tant d’autres ne lui réussirait-il pas à lui-même ?

Il s’habitua de plus en plus à cette idée, sans en reparler encore à sa femme. Peut-être attendait-il que celle-ci revînt la première sur ce sujet ; mais Mme Berthier semblait mettre de la malice à ne plus vouloir se souvenir de leur dernière conversation ; elle feignait même de ne point s’apercevoir que son mari sortait beaucoup moins maintenant, et qu’il lisait beaucoup plus, principalement des brochures sur les questions coloniales et sur Madagascar.

Un matin Michel demanda d’un air indifférent à sa femme si elle était toujours dans les mêmes dispositions au sujet de l’offre de l’oncle Daniel.