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leur peine, ni leur santé, est un de ceux qui font le plus d’honneur à l’énergie et à l’esprit d’initiative de notre race. Courageusement, vous et votre digne frère – que je suis heureux de remercier publiquement ici des services dévoués rendus par lui au Corps expéditionnaire, – vous avez, malgré votre jeunesse à tous deux, repris et continué l’œuvre de vos parents, convaincus avec raison que c’était la meilleure et la plus noble façon d’honorer leur mémoire. Si de là-haut ils pouvaient suivre les destinées des êtres chers qu’ils ont laissés sur cette terre, ils se croiraient payés du sacrifice de leur vie en vous voyant aujourd’hui sur le seuil d’une existence nouvelle où vous êtes assurée de trouver le bonheur que vous méritez si bien, et que je vous souhaite de tout mon cœur. Il me reste un mot encore à vous dire, Madame. Permettez-moi de vous remettre mon cadeau de noce. Vous trouverez dans ce modeste écrin une croix de chevalier de la Légion d’honneur, que je vous laisserai le plaisir d’accrocher vous-même sur la poitrine loyale d’un homme que tous ici nous aimons et nous estimons, M. Daniel Berthier-Lautrec, votre oncle. »


Au premier moment, le vieux Daniel ne comprit pas. Mais quand Marguerite, les yeux pleins de larmes de joie, s’approcha pour épingler le ruban de la croix sur le côté gauche de son habit, aux applaudissements de la foule entière, il sentit ses jambes flageoler sous lui, un flot de sang lui monta au visage et, les mots s’étranglant dans sa gorge, il eut à peine la force de balbutier :

« La croix à moi ! La croix !… Mais non ; ce n’est pas