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leurs instructions. Tous les officiers ont le plan de Tananarive à la main.

Le moment est vraiment solennel. Les sonneries de clairon, répétées par les échos de la ville, vibrent au fond de tous les cœurs. Henri et moi, nous sommes avec le Général, derrière le 2e bataillon du Régiment d’Algérie ; machinalement, nos yeux se fixent sur la porte de la ville qui est en face de nous, derrière laquelle c’est l’inconnu.

Il est 3 heures 40. Cinq minutes encore, et nous partons. Tout à coup, par la porte, débouchent au pas de course deux soldats hovas brandissant des drapeaux blancs ; derrière eux, des filanzanes dans lesquels sont transportés sans doute les parlementaires qu’on n’attendait plus. Je braque ma jumelle sur le Palais, le pavillon de la Reine a disparu, et je vois hisser à sa place un drapeau blanc. Décidément c’est la ville qui se rend.

Aussitôt le feu cesse partout, et un soupir de soulagement sort de nos poitrines. Certes, tous nous étions prêts à marcher sous la mitraille ; mais maintenant que tout est fini, nous ne pouvons pas nous empêcher de penser à la boucherie qui nous attendait peut-être dans cette ville bourrée de soldats armés, où chaque rue à pic, chaque plate-forme étaient garnies de mitrailleuses ; et ce n’est pas sans un certain sentiment de bien-être que nous nous serrons les mains en nous disant que tout de même nous l’avons échappé belle.

Cependant le Général en chef renvoie les parlementaires ; il en réclame d’autres plus qualifiés et munis de pouvoirs en bon ordre. Vingt-cinq minutes après, retour des parlementaires. Cette fois, ce sont des manières de personnages :