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« Il ne faut pas vous étonner que nous vous ayons un peu oublié, lui dit-il. Nous sommes obligés de faire face à tous et à tout. Mais je vous promets de saisir le premier moment favorable pour rappeler au colonel votre offre de mettre à sa disposition votre connaissance des gens et de la langue du pays. Laissez-nous encore quelques jours pour nous retourner et je m’engage à vous obtenir une réponse qui, je l’espère, vous donnera toute satisfaction.

Henri remercia chaleureusement le capitaine Gaulard et regagna la petite maison indienne où il s’était installé avec sa sœur pour suivre de plus près son affaire. Il y trouva leur oncle Daniel Berthier-Lautrec, arrivé une heure auparavant de Manakarana.

En apprenant de la bouche de son neveu dans quel embarras se débattait le haut commandement, Daniel poussa les hauts cris.

« Je me doutais bien que ça ne marchait pas ! dit-il. Je n’ai fait que traverser la ville, et ce que j’ai vu m’a suffi. Tous ces soldats qui vont et viennent, les mains dans les poches, autour des tas de patates, que les Comoriens et les gens de la Côte leur vendent vingt fois ce qu’elles valent ; se bousculant pour entrer dans les paillotes, où les mercantis leur versent une absinthe de contrebande, pendant que les bâtiments et les baraquements n’avancent pas. C’est pitoyable ! »

Malgré tout ce qu’on essaya pour le retenir, dès le lendemain matin, le diable d’homme se dirigea vers la Résidence, avec l’idée formelle d’arriver jusqu’au colonel Lebreton et de lui expliquer carrément sa façon de penser.