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sortit de la maison, tenant à la main une liasse de papiers, qu’il feuilletait d’un air très absorbé.

Mû par une inspiration soudaine, Henri s’avança et, abordant poliment l’officier :

« Mon capitaine, lui dit-il, je désirerais parler au Général.

— Impossible ce matin, monsieur ! répondit l’officier assez brusquement. Le Général ne reçoit personne. Nous avons de la besogne par-dessus la tète, et vous comprenez…

— Il faut pourtant que je le voie !

— Oui, il le faut ! » ajouta Marguerite, en s’approchant à son tour.

Surpris, le capitaine regarda la jeune fille, vraiment touchante à voir et dont le petit ton résolu contrastait d’une façon piquante avec la fraîcheur et la grâce de ses dix-sept ans.

« Mon Dieu, mademoiselle, reprit-il d’une voix radoucie, je ne demanderais pas mieux que de vous être agréable, mais je vous assure que ce n’est pas possible. L’ordre est pour tout le monde. »

Si peu coquette que fût Marguerite, elle était femme, et elle se rendit parfaitement compte du changement subit que son intervention inattendue avait produit dans le ton de l’officier. Aussi, refoulant sa timidité naturelle, osa-t-elle insister.

« Je suis sûre, dit-elle en souriant gentiment, que si vous voulez bien essayer vous obtiendrez de M. le Général qu’il consente à nous recevoir. Ce que nous avons à lui dire, mon frère et moi, est de la plus grande importance pour nous, et ne peut manquer de l’intéresser aussi lui-même.