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aussitôt le nouveau malheur qui venait de les frapper, elle poussa un cri d’horreur, et roula par terre, foudroyée. Ce ne fut qu’au bout d’une heure qu’elle sortit de cet évanouissement pour s’abandonner à une longue crise de larmes.

Henri se remit le premier. Malgré tout, il ne pouvait chasser un reste d’espoir. Tant qu’il n’aurait pas vu par lui-même les témoignages irrécusables de la catastrophe, il ne croirait pas à sa réalité. Il interrogea de nouveau Naïvo minutieusement, revenant sur chaque détail, espérant trouver dans les réponses du noir une contradiction, ou une lacune qui laissât la porte ouverte à quelque espérance.

« Mais enfin, lui demanda-t-il, comment as-tu pu, toi, échapper au massacre et cependant voir tout ce qui s’est passé ? »

Alors le noir raconta qu’à demi assommé à coups de crosse il était tombé un des premiers, pendant qu’on s’acharnait sur les Vasahas ; pour ne pas être achevé, il n’avait plus bougé, faisant semblant d’être mort. Il était resté ainsi jusqu’au milieu de la nuit ; puis, pendant que les Fahavalos célébraient leur victoire en buvant du rhum et en dansant comme des furieux autour de leurs sanglants trophées, il avait réussi à se traîner jusqu’à la rivière Antambo, où il s’était baigné pour reprendre des forces. Après quoi il s’était remis en route pour revenir à Maevasamba.

« Et tu es sûr du village ? Tu le reconnaîtrais ?

— Bomazonga ? Moi été cent fois ! Moi conduirais Bomazonga yeux fermés !

— Eh bien ! tu vas m’y conduire ! »