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voyons ou croyons voir les parties. Personne n’a mieux senti cette vérité que le grand Leibnitz ; et, pour la rendre plus sensible, il a eu recours à l’exemple suivant. Prenez, dit-il, deux poudres colorées ; l’une, d’un blanc éclatant ; l’autre, d’un rouge vif ; mêlez-les ensemble bien exactement, puis vous étant placé à une distance d’où vous ne puissiez plus distinguer les deux poudres, considérez ce mélange, vous ne verrez plus qu’une seule couleur, qui sera une espèce de couleur de chair ; ou, si, pour éviter l’effet de la prévention, vous chargez une autre personne qui n’ait point vu mêler les deux poudres, de faire cette observation, elle se croira certaine de n’avoir sous les yeux qu’une seule couleur simple. L’ayant ensuite armée d’une loupe un peu forte, dites-lui de se rapprocher de cette poudre, et de l’examiner à l’aide de ce verre, elle y démêlera les petits grains rouges d’avec les blancs, et verra alors deux couleurs distinctes où d’abord elle n’en voyoit qu’une. Il en est de même de toutes les sensations ; celles qui nous paroissent les plus simples, sont réellement très composées. Par exemple, lorsque j’aperçois la couleur rouge, qu’on regarde ordinairement comme simple, ma sensation est alors produite par quatre principales espèces de causes ; savoir : 1° la figure, la grandeur, le nombre, la situation absolue et respective, etc. des parties