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qu’il y en avoit encore assez pour faire de ses gens un carnage effroyable.

Il est une infinité d’exemples qui montrent combien entre la multitude et le courage le combat est inégal. Ainsi, qu’on tienne pour une vérité certaine et bien constatée que par rapport à la grandeur d’un royaume ou d’un état, le principal point est que la nation soit de race et d’humeur belliqueuse. Et c’est un proverbe plus rebattu que vrai, que celui qui dit : l’argent est le nerf de la guerre ; si d’ailleurs il s’agit d’une nation molle et efféminée, qui n’ait point de nerf dans les bras. Car c’est avec raison que Solon répondit à Crésus, qui faisoit devant lui un étalage de son or : oui ; mais s’il vient un homme qui sache mieux que vous manier le fer, tout cet or lui appartiendra bientôt. Ainsi que tout prince et tout état, quel qu’il puisse être, dont les sujets naturels manquent de courage et de qualités guerrières, ne se fasse pas une trop haute idée de ses forces ; et qu’au contraire les princes qui commandent à