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rité, toute précieuse qu’elle paroît, n’a peut-être qu’un prix comparable à celui d’une perle que le grand jour fait valoir, et non égal à celui d’un brillant ou d’un escarboucle qui joue davantage aux lumières. Quoi qu’il en soit, il n’est pas douteux qu’un peu de fiction alliée avec la vérité ne fasse toujours plaisir. Ôter des âmes humaines les vaines opinions, les fausses estimations, les fantômes séduisans, et toutes ces chimériques espérances dont elles se paissent, ce seroit peut-être les livrer à l’ennui, au dégoût, à la mélancholie et au découragement. Un des plus grands docteurs de l’église (dont la sévérité nous paroît toutefois un peu outrée) qualifie la poésie de vin des démons, parce que les illusions dont elle remplit l’imagination occasionnent une sorte d’ivresse ; et cependant la poésie n’est encore que l’ombre du mensonge. Mais le mensonge vraiment nuisible, ce n’est pas celui qui effleure l’esprit humain, et qui ne fait, pour ainsi dire, qu’y passer,