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ne porte envie aux autres, qu’autant que l’on se compare à eux : où il n’y a point de comparaison, il ne peut y avoir d’envie. Aussi voit-on que les rois ne sont point enviés par leurs sujets, mais seulement par d’autres rois. On doit toutefois remarquer que les personnes de peu de mérite, d’un mérite médiocre, sont plus exposées à l’envie au commencement de leur fortune que dans la suite, et que le contraire arrive aux personnages d’un mérite éminent ; quoique ce mérite soit toujours le même, son éclat diminue ; les yeux s’y accoutumant peu à peu : sans compter qu’il est tôt ou tard obscurci par celui des nouveaux venus qui paroissent sur la scène[1].

  1. Il n’est point de personnage d’un mérite transcendant auquel l’éclat même de ce mérite ne suscite tôt ou tard quelque émule qui est en partie son élève, qui, prenant une route diamétralement opposée à celle du maître, devient son adrersairo, le combat avec la force même qu’il a tirée de lui, et le balance dans l’opinion publique. Tels furent Themistocle et Aristide, Agésilas et