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mande à la nature, c’est surtout dans l’adversité qu’on en voit. Une autre pensée encore plus haute que celle dont nous venons de parler, et même trop haute pour un païen, c’est la suivante : le plus grand et le plus beau spectacle c’est de voir réunies, dans un même individu, la fragilité d’un homme et la sécurité d’un Dieu. Cette pensée auroit mieux figuré dans la poésie, genre auquel semblent appartenir ces sentimens si élevés ; et la vérité est, que les poëtes n’ont pas tout-à-fait négligé ce noble sujet ; car c’est cette sécurité même qui semble être figurée par une fiction assez étrange des anciens poëtes ; fiction qui renferme quelque mystère, et qui se rapporte visiblement à une disposition de l’âme très analogue à celle du vrai chrétien ; les poëtes, dis-je, ont feint qu’Hercule, dans l’expédition entreprise pour délivrer Prométhée (qui représente la nature humaine), traversa l’océan dans un vase d’argile : allégorie qui peint assez vivement ce courage qu’inspire le chris-