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se parler les autres à leur tour, et s’il se trouve quelqu’un qui s’empare trop souvent de la parole, ou qui la retienne trop long temps, et qui se rende ainsi le tyran de la conversation, détournez-le adroitement, afin que tel qui s’est tu trop long-temps, puisse, à son tour, entrer, pour ainsi dire, en danse. Si vous avez quelquefois l’adresse de feindre d’ignorer ce que vous savez le mieux, vous paroîtrez souvent savoir ce que vous ignorerez peut-être. Il ne faut parler de soi que très rarement, et avec beaucoup de réserve[1]. Un homme de ma connoissance disoit d’un autre qui avoit ce travers : il faut que cet homme soit d’une grande sagesse, puisqu’il parle si souvent de lui-même. Il n’est qu’une seule manière de se louer de bonne grâce, c’est de louer, dans un autre, une vertu ou un talent qu’on possède soi--

  1. Si l’on dit du bien de soi, l’on n’est pas cru ; si l’on en dit du mal, on est pris au mot : on ne gagne donc jamais rien à parler de soi.