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chrétienne. Mais il est peu d’hommes qui comprennent bien en quoi consiste la vraie solitude, et qui en aient une idée assez étendue : car une foule n’est rien moins qu’une société ; une multitude de visages n’est tout au plus qu’une galerie de portraits ; et une conversation entre des personnes qui n’ont que de l’indifférence les unes pour les autres, n’est guère plus agréable que le son d’une cymbale, Cet adage latin : grande ville, grande solitude, a trait à ce que nous disons ; car assez ordinairement, dans une grande ville, des amis se trouvent écartés les uns des autres, et ne peuvent se rejoindre que rarement. Quoi qu’il en soit, nous pouvons dire qu’il n’est point de solitude plus affreuse que celle de l’homme sans amis, et que, sans l’amitié, ce monde n’est, à proprement parler, qu’un désert. Ainsi, en ce sens, celui qui est incapable d’amitié, tient plus de la bête sauvage que de l’homme.

Le principal fruit de l’amitié est qu’elle fournit continuellement l’occasion de se