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On ne doit pas non plus se décider trop aisément à faire de nouvelles expériences sur le corps politique, pour remédier à ses maux, hors le cas d’une urgente nécessité, ou d’une utilité manifeste. Et, avant de se déterminer à ces innovations, il faut être bien sûr que c’est le désir de réformer qui attire le changement, et non le désir de changer, qui attire la réforme. En un mot, toute innovation doit être sinon toujours rejetée, du moins toujours un peu sus-

    soupçonner que ce qui lui paroit juste depuis doux jours, ne l’est pas plus que ce qui lui avoit paru tel depuis son enfance, et s’il est de bonne foi avec lui-même, il perd ses principes : au lieu que ceux qui n’ont point de principes, en changent tant qu’on veut, et, à la faveur de cette souplesse très méritoire, sont de très bons citoyens, à l’ordre du premier venu : combien de jours, de semaines, de mois ou d’années faut-il attendre, pour avoir droit de violer un premier serment, et d’en faire un second ? Telle est peut-être la vraie cause de l’irrésolution et de l’inertie de certains individus, dans un vaisseau qui a perdu sa boussole, et que des fous actifs pourront sauver par hazard. Trop sou-