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barrassent les uns dans les autres. Or, c’est à la lumière incertaine des sens, lumière qui tantôt brille et tantôt se cache, qu’il faut faire route à travers les forêts de l’expérience et des faits particuliers. Il y a plus : ceux qui se donnent pour guides, comme nous l’avons dit, ne sont pas moins embarrassés que les autres, et ne font qu’augmenter le nombre des erreurs et de ceux qui se trompent. Parmi tant de difficultés, il faut désespérer du jugement humain, soit quant à la force qui lui est propre, soit quant à un heureux hazard qui le feroit rencontrer juste ; car il n’est ni supériorité de génie, ni chance heureuse, quelque nombre de fois qu’elle se répète, qui puisse surmonter de telles difficultés. Il nous faut un fil pour diriger notre marche ; il nous faut tracer la route toute entière depuis les premières perceptions des sens jusqu’aux principes. Et qu’on ne prenne pas ce que nous disons ici en ce sens, que, depuis tant de siècles, il n’y auroit eu absolument rien de fait ;