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Tu n’as point suivi Hugues de Saint-Pierre contre qui, d’ailleurs, l’abbaye, où s’incarnait le principe de tradition et d’autorité, finit par avoir raison. Mais, sans le vouloir, tu as bénéficié du grand mouvement de révolte contre ce principe.

Il s’en faut encore de beaucoup que la vie te soit clémente. Parfois, c’est en vain que tu laboures la terre : autant vaudrait labourer le sable, et tu te dis tout bas que le Christ et les Saints sont endormis. Tu dois à l’abbaye et au château des droits multiples de corvée, de gîte, de guet, d’ost, de pacage, de banvin, de banalités. Tu dois, pour le compte de l’abbé et du seigneur, faucher, faner, labourer, scier les blés, les rentrer, les battre, fournir pour les charrois harnais et bêtes, charrettes et conducteurs, faire les chemins, vider les écuries, curer les étangs, chasser les loups. Pour payer à qui tu dois, tu serais souvent embarrassé, sans la coutume de notre pays. Voici ce qu’elle dit au sujet, par exemple, des blés et des bœufs : « Pour ce que les bleds viennent tant par le labeur de l’homme que par le labeur du bœuf ou cheval qui laboure, et que coutumièrement le labou-