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de branchages et de roseaux. Parfois ta misère est si grande, que tu es tenté de suivre ceux qui se révoltent. Tu entends prononcer les noms de Sacrovir, de Vindex et de Sabinus. Mais tu ne bouges pas, car le christianisme, qu’on te prêche, t’enseigne à supporter tes maux et même à les bénir. Tu entends prononcer les autres noms de Pothin, et de Blandine, ta sœur lointaine. Et j’ai beau regarder très attentivement, avec le secret désir de t’y voir : je ne te découvre point dans les rangs des Bagaudes. Peut-être est-ce parce qu’ils sont trop nombreux : cent mille, qui assiègent Autun et renversent ses remparts !

Sous les Francs, ces hommes qui se parent de la dépouille des ours, des veaux marins, des aurochs et des sangliers, qu’es-tu ? Te voici serf pour des siècles. Entre tes maîtres, tu n’as que l’embarras du choix. Serf d’un domaine royal, tu n’en aurais qu’un. Habitant de ta mince châtellenie, tu en as vingt. Es-tu aubain, manant, roturier, rustre, ou vilain ? N’y regardons pas de si près. Tu es serf et travailles pour tes maîtres. Si tu n’as aucun droit, tu as des multitudes de devoirs. Guerres intestines, inva-