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LE SERVITEUR

— Plus tard, lorsque je serai grand, je me souviendrai de ces vêpres d’hiver.

Par anticipation j’y trouve du charme.

Blanc et noir, le dallage du chœur a l’air glacé. L’abbé Lemaître pose de temps en temps son bréviaire pour se frotter les mains. Ce serait un supplice, s’il y avait une procession, que de porter la croix ou les chandeliers de nickel. Les saints eux-mêmes, sur leurs socles, dans l’ombre qui envahit tout, semblent avoir froid ; saint Martin, s’il était ici, regretterait d’avoir donné la moitié de son manteau.

Je songe à des vêpres dans une église plus étroite, plus vieille, une église où il fait sombre même en été. Ce serait aujourd’hui la nuit complète. Il n’y aurait pas de dames à chaufferettes dorées : rien que des vieilles avec de gros sabots tout bosselés de neige. Je me trouve bien dans mon coin obscur où personne ne me remarque. Je ne sens pas le froid, et voudrais passer là toute ma vie. Quand, les Vêpres finies, le moment vient de rentrer à la maison, où m’attend un bon feu, je frissonne, le cœur serré.

Tu te tenais dans le chœur, près de l’autel, et tu suivais les offices dans un petit livre. Je sais