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LE SERVITEUR

Viens voir comme ils boivent ! Maltat et sa femme, qui ont dressé là leur ramée, ne savent plus où donner de la tête. On leur demande du vin. On leur demande de la bière. Ils ne cessent pas de remplir des litres aux deux tonneaux qu’ils ont calés avec des pierres et de la mousse. Et ils en ont deux autres, en réserve, qui ne pèseront pas lourd ce soir, à dix heures.

Viens voir les blanques, et le tir, et le manège des chevaux de bois ! Les gamins et les gamines qui n’ont pas encore l’âge de danser tournent sur le manège : c’est leur manière de se laisser entraîner par le tourbillon de joie du printemps revenu. Ils poussent des cris qui se confondent avec les notes aiguës du violon.

Viens voir l’herbe et les feuilles repoussées ! Le bois t’attend. Contre l’écorce de ce chêne tu colleras ton oreille, et tu entendras la sève monter des entrailles de la terre jusqu’à la moindre de ses branches. Regarde au-dessous de la route tous ces arbres qui dévalent vers le creux du ravin où coule la cascade : là aussi le printemps travaille. Il est partout à la fois, et c’est presque d’un seul coup qu’il a tendu au-dessus de la terre et des rochers ce dôme de