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tiques, vers le commencement du xu* siècle : ils allaient, sous le nom de comiques, jouer de châteaux en châteaux de petits drames qu’ils improvisaient ; c’étaient des pastorales, des chautrels, des comédies. Mais, abusant de leur vogue, ils devinrent licencieux, et, vers la fin du même siècle, on les bannit de. toute honnête société.-Les Confrères de la Passion relevèrent une troisième fois, à la fin du XIV’siècle, l’art et la profession dramatique en France. Ils eurent pour rivaux les Clercs de la Basoche et les Enfants sans-souci ; telles furent les premières troupes d’acteurs de profession (V. Cournamzs ne LA PASSION, BAsocue, ENFANTS sANs-souci). Dans ces troupes, des hommes jouaient les roles de femmes, et ce ne fut qu’en 1634, dans la Galerie du Palais, de P. Corneille, qu’une femme, la Beaupré, parut pour la 1" fois sur la scène. La condition des acteurs était alors encore fort misérable ; le tableau qu’en fit Scarron dans son Roman comique, publié vers 1662, en donne une idée, et ne s’applique pas uniquement aux comédiens ambulants. Cependant, c’est dans ce xvmfi siècle que la profession d’acteur acquit, du moins à Paris, une certaine importance, par les études sérieuses qu’elle exigea pour jouer des pièces plus parfaites, par les directions que les comédiens reçurent de poëtes tels que Corneille, Molière et Racine. De cette école sortirent Baron, Dufresne, Montfleury, Poisson, la Cliampmèlé. Molière, que Louis XIV l’honorait de sa familiarité, exerça aussi la profession d’acteur : mais c’était au poëte bien plus qu’au comédien que s’adressait la haute distinction du roi. La profession était si médiocrement considérée, qu’un noble qui l’embrassait dérogeait, à moins que, comme Floridor, il n’entrat dans la troupe des comédiens royaux. Une autre cause du décri des acteurs, c’était l’excommunication de l*Église. Cependant les chanteurs de l’Académie royale de musique n’étaient point excommuniés, peut-être parce que ce spectacle avait été établi sous le nom d’Académie. Au XVIII’siècle, les acteurs de l’Opéra-Italien et ceux de l”Opéra-Comique’ne furent pas non plus repoussés du sein de l”Église, comme l’étaient, bien que comédiens ordinaires du roi, les acteurs du Théatre-Français. Cependant toute la haute société semblait presque s’assimilera eux par son goût efl’réné pour le théâtre, goût dont le souvenir se trouve consigne dans les vers suivants de la Metromanie (III, 5), jouée en 1733 : J’ai vu ce charme en France opérer des miracles, Nos palais devenir des salles de spectacles, Et nos marquis, chaussant il l’cnvi l’escarpin, Représenter Hector, Sganarelle ou Crispin. Dans ce siècle se développèrent plusieurs grands talents d’acteurs, Lekain, Larive, M“°’ Clairon et Gaussin, dans le tragique ; Molé, Préville, Dugazon, 1v1“° Contat, dans le comique. Les mœurs licencieuses de l’époque, la légèreté de la haute société qui ne voyait partout que le plaisir, donnèrent une’sorte d’importance aux acteurs, qu’elle prenait pour maîtres et pourmodéles, qu’elle admettait dans ses salons pour jouer la comédie avec eux. Malgré cette familiarité, elle garda toujours son rang vis-à-vis d’eux dans les relations purement sociales. -. Vint la Révolution, qui, en eílaçant toutes les distinctions de rang, de naissance et d’origine, en détruisant la religion qui anathématisait les acteurs, sembla les mettre au rang de tous les citoyens. On en vit plusieurs, en eiïet, comme chez les Athéniens, occuper des positions assez élevées dans les assemblées délibérantes, et même dans la haute administration d’alors ; mais ils avaient quitté leur profession d’acteur. -L’ordre politique, rétabli par Napoléon Ier, rendit les acteurs tout à leur art ; et dans cette période, étendue’jusqu’aux premières années de la Restauration, il s’éleva des talents distingués, tels que’I’alma, M“°’ Duchesnois et Georges, dans la tragédie ; Fleury et M“° Mars dans la comédie ; enfin, depuis 1830, M“° Rachel, qui procura encore une période brillante à. la vieille tragédie de Corneille et de Racine. L’opinion vulgaire attribue la rigueur de la censure publique qui atteint les acteurs à. la facilité de leurs mœurs, en général, facilité provoquée par la nécessité où ils sont de jouer avec les passions. Ne pourrait-on pas dire que le préjugé qui pèse sur eux est une cause non moins puissante du relâchement qu’on leur reproche, et que, par une sorte de capitulation de conscience, à laquelle la faiblesse humaine ne résiste pas toujours, il tend à les délier, en quelque sorte, de la règle commune ? Quoi Qllall en soit, les préventions tendent aujourd’hui à. s’éteindre, et l’acteur honnête homme, galant homme, homme de talent, est accueilli comme tel, sans que sa profession soit un obstacle à sa considération.. Toutefois, un signe d’infériorité, qui ne s’explique que par une certaine susceptibilité, par un certain sentiment indéfinissable des plus délicates convenances, fait que les acteurs ne sont point admis dans les ordres de chevalerie, bien qu’aucun règlement ne s’y oppose ; plusieurs anciens acteurs, entrés ou restés dans la carrière du professorat au Conservatoire de Musique et de Déclamation, ont obtenu ces distinctions honorifiques ; mais, quoique leurs succès d’autrefois puissent avoir été l’uno des causes déterminantes pour les leur accorder, cependant c’est comme professeurs qu*ils ont été décorés. A l’étranger, la condition des acteurs commença aussi par être fort misérable : l’Histriomastia : (le fouet des comédiens), publié par Prynne en 1633, prouve combien les acteurs étaient méprisés en Angleterre. Plus tard, il se fit aussi une révolution d’estime à leur égard. Aujourd’hui, particulièrement en Angleterre, en Allemagne et dans plusieurs pays du nord de l’Europe, les grands artistes dramatiques sont plus honorés, plus haut placés qu’en France, jusque-la que des personnages de l’aristocratie n’ont pas cru déroger en épousant des actrices. Des lords et des pairs d’Angleterre suivirent le convoi funèbre de Garrick et de mistriss Odlefields ; et les restes de Shakspeare et de Garrick reposent dans l’église de Westminster, auprès de la sépulture des rois. La profession de comédien, à Paris, a toujours été rétribuée modérément, sans être néanmoins trop en désaccord avec les salaires des gens d’intelligence ; les appointements annuels d’un acteur de. la troupe de Molière étaient de 300 livres, pouvant donner une position équivalente à celle qu*on aurait aujourd’hui avec 5,000 fr. ; vers 1750, le célèbre tragique Lekain ne recevait de la Comédie-Française que 2,000 livres, valant, d’après le même point de comparaison, plus de 4,000 francs ; vers 1820, les premiers sujets de l’Opéra étaient. appointés à 15,000 fr., représentant une position sociale de 25,000 fr. au moins d’aujourd’hui. — On voit que le taux des traitements donnés, de nos jours, aux acteurs d’un certain talent, ne diffère guère de ce qu’il était il y a plus de 40 ans ; ces traitements sont de 25 à 30,000 fr., -certains vont jusqu’à 50,000 fr., 60,000 fr., et même 100,000 fr., mais cela n’a ’lieu qu’a Paris et dans les principales capitales de l’Europe, et pour des artistes d’un très-grand talent. De telles rémunérations n’étaient pas possibles autrefois, parce que les recettes des théâtres étaient intlniment moins considérables que de nosjours. Une direction théâtrale est une entreprise de commerce, et le directeur, comme tout commerçant, paie en proportion des bénéfices qu’il fait ou peut faire. Ce que l’on peut dire contre les gros appointements de certains artistes n’est donc fondé ni en logique, ni en droit.

Les acteurs ne font acte de commerce, ni par leur engagement avec un directeur de théâtre, contrat purement civil, ni par achat de costumes nécessaires à leurs roles, a moins que ces costumes ne soient achetés par plusieurs acteurs associés pour une entreprise théâtrale. Cette doctrine est celle de Goujet et Merger (Dictimm. de droit commercial), de Lacan et Paulmier (Traité de la législation et de la jurisprudence des théâtres), malgré la jurisprudence contraire de plusieurs cours impériales de France. Mais, quoique non commerçants, les acteurs sont, pour leurs engagements avec un directeur, justiciables des tribunaux de commerce.-Sur l’art de l’acteur ou du comédien. V. DRAMATIQUE (Art). B. et C. D-Y. ACTIF, terme de Grammaire, se dit des mots exprimant une action, et s’oppose a passif. *Il s’applique particulièrement aux verbes ; et on appelle verbe actif celtl’ dont le sujet fait l’action. Ainsi j’aime, j’honore, je déliq je montre, j’avertis, je reçois, je rends, j’imite, ’e proc mets, je vais, je viens, je cours. je marche, je parie, sont autant de verbes qui marquent une action faite par lt. sujet je. Néanmoins, dans l’usage, on ne donne le norm d’actifs qu’aux verbes qui expriment une action susceptible de passer, immédiatement et sans le secours d’aucun mot intermédiaire, du sujet a l’objet, et qui peuvent recevoir la forme passive. En grec, en latin, en allemand, ces verbes gouvernent l’accusatif ; tels sont les neuf premiers verbes cités plus haut. Par extension, on a donné le nom d’acti]’s- a certains verbes qui n’expriment pas précisément une action, mais qui sont suivis d’un complément direct en français, en italien, en espagnol, en anglais, et de l’accusatif dans les langues qui ont des cas, comme, par exemple, savoir, pouvoir, posséder, avoir. Tout verbe qui ne reçoit pas en français un complément