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la divinité et de l’humanité comme l’homme qui est composé de l’âme et du corps » employée par quelques Pères, et dans quel sens il faut l’admettre ; il lui explique avec beaucoup de talent et de précision cette comparaison et ses points de similitude ; il lui montre quelles conséquences absurdes s’ensuivraient si la similitude était absolue sur tous les points. C’est une parfaite dissertation scolastique sur l’Incarnation et en même temps un commentaire fidèle de la doctrine du Concile de Chalcédoine et de la lettre de Léon le Grand qu’il appelle Saint, le Pape Pur, Innocent et Bienheureux[1]. Il termine cette lettre en exhortant son ami à quitter son hérésie et à embrasser la foi orthodoxe, et en demandant pour lui l’assistance de la « Mère de Dieu, celle de saint Sabba, patron du couvent où le livre a été écrit et dont nous avons copié ce livre[2], celle de tous les saints Pères qui ont la foi orthodoxe, qui reconnaissent les sept saints Conciles, avec la prière de tous ceux qui ont la foi orthodoxe du Concile de Chalcédoine, etc. »

Le huitième (p. 140-180) est le plus intéressant : c’est un résumé de la théologie catholique et un modèle de la scolastique naissante ; c’est-à-dire : c’est une démonstration de la vraie religion qui est la religion chrétienne, qui se trouve dans la doctrine orthodoxe seule. Abou-Kurra adresse cette démonstration aux juifs, aux infidèles et à tous les hérétiques de son époque qu’il énumère. Il n’a jamais connu Photius ; mais il l’a réfuté d’avance, comme s’il l’avait prévu ; il ne reconnaît pas seulement la primauté de saint Pierre et celle de ses successeurs comme un simple fait de la vie ou de l’organisation de l’Église, mais il le considère encore comme un fait capital et un point fondamental sur lequel il s’appuie pour combattre ses adversaires. Il établit l’institution de cette primauté par de nombreux textes bibliques qu’il commente avec beaucoup de force et de précision. Il prouve encore cette institution par des faits qu’il emprunte à l’Ancien et au Nouveau Testament à partir de la loi de Moïse qui en était la figure (Deut., xvii). Il rapporte aussi tous les Conciles œcuméniques qui ont été convoqués et présidés par saint Pierre et ses successeurs, depuis la première assemblée des Apôtres à Jérusalem jusqu’au septième Concile de Constantinople. Il discute l’autorité de chaque Concile avec les hérétiques qui ne l’acceptent pas.

Nous publions ce traité avec une traduction française pour en donner une idée exacte et établir la tradition chrétienne en Orient au ixe siècle sur la primauté de saint Pierre. Nous montrerons ainsi que les Melchites de cette époque ne partageaient aucunement les idées schismatiques de Photius de Constantinople.

  1. P. 136.
  2. P. 139. Il est bien clair que ces mots « dont nous avons copié ce livre » sont écrits par le moine Agabi qui a copié ce livre sur le manuscrit de Saint-Sabba, comme on le voit aussi dans la note de Mgr Basile (cf. p. 8) ; mais on ne peut dire sans témérité la même chose de la phrase qui précède : « S. Sabba, patron du couvent où ce livre a été écrit » ; que c’est une interpolation du premier copiste, qui pouvait être religieux de Saint-Sabba.