ce qu’il ne trouve pas à propos de révéler, je veux dire le nom de l’Auteur. Heureusement M. Boscheron y a supléé... Non content d’avertir que c’est à M. l’abbé d’Aubignac, célèbre par sa Pratique du Théâtre, à qui on en est redevable, il a bien voulu encore faire part des raisons qu’il a pour les lui attribuer ; raisons qui sans doute paraîtront concluantes. Quoi qu’il en soit et malgré les clameurs de Mad. Dacier, cet ouvrage ne sauroit faire tort à la réputation de ce savant Abbé que dans l’esprit des outrez Adorateurs d’Homère, auxquels il a voulu enlever l’objet de leur passion et de leur culte, n’y ayant nulle apparence que l’autorité de M. Despréaux persuade aucune autre personne, qu’un Ouvrage si suivi et plein d’une Littérature aussi recherchée puisse être le fruit d’une vieillesse tombée en enfance, ainsi que, pour dernière ressource, [M. Despréaux] le veut faire soupçonner dans sa troisième Réflexion sur Longin[1]. »
Même avant l’apparition du livre, les idées de d’Aubignac étaient connues. On les discutait depuis vingt ans. Dès 1692, Ch. Perrault écrivait dans le troisième Dialogue de son Parallèle des Anciens et des Modernes : « Il est bon de remarquer que beaucoup d’excellens critiques soutiennent qu’il n’y a jamais eu au monde un homme nommé Homère, qui ait composé les vingt-quatre livres de l’Iliade et les vingt-quatre de l’Odyssée... Ils disent que l’Iliade et l’Odyssée ne sont autre chose qu’un amas, une collection de plusieurs petits poèmes de divers auteurs, qu’on a joints ensemble [dans] l’ordre et l’arrangement où nous les voyons... L’abbé Daubignac avoit des mémoires tout prêts où il prétendoit
- ↑ Ce compte rendu du Journal littéraire est le plus complet et le plus exact que l’on puisse faire du livre ; à défaut des Conjectures elles-mêmes, il peut suffire de le connaître pour apprécier les procédés de Wolf à l’égard de d’Aubignac.