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durant l’antiquité, d’appellations grecques, que tout auditeur hellénique comprenait aussitôt : Ortygia, « l’Ile aux Cailles », Achné, « l’Ile de l’Écume », Plateia, « l’Ile Plate », Aéria, « l’Ile Aérienne ». Ces appellations grecques, oubliées aujourd’hui, n’étaient que la traduction des noms mystérieux, dont une étymologie sémitique peut sûrement nous rendre compte : Casos-Achné, Paxos-Plateia, Thasos-Aéria, Samos-Hypsélé, Délos-Ortygia sont autant de « doublets » comme disent les géographes.

Tous les lecteurs savent ce qu’il faut entendre par là. Il était jadis au bord de l’Adriatique un haut pays, couvert de forêts que ses occupants appelaient Tcherna Gora, le « Noir Mont » : les Vénitiens traduisirent en Monte Negro. Il était dans l’Archipel une presqu’île montagneuse que les Grecs indigènes appelaient Hieron Oros, la Sainte Montagne : Vénitiens et Génois traduisirent en Monte Santo.

Dans les vieux doublets de la Méditerranée grecque, Casos-Achné, Thasos-Aéria, Délos-Ortygia, etc., le premier terme est l’original, semble-t-il, et le second est une copie postérieure : les Sémites ont créé le premier ; les Hellènes lui ont substitué le second. Car on ne voit ni quand ni comment ni pourquoi les Hellènes, si l’appellation grecque eût été l’original primitif, auraient ensuite abandonné ce terme