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niciens[1], qui ne régnaient plus en maîtres absolus sur les mers et le commerce du Levant, contrôlaient pourtant une grande part des échanges. Ils habitaient à demeure dans leur Camp de Milet, autour de quelque sanctuaire national. Ils y conservaient leurs mœurs et leurs cultes, usaient entre eux de la langue maternelle, lisaient ou chantaient les écrits et poèmes nationaux.

Les Cadméens étaient tout désignés pour servir d’intermédiaires entre ces étrangers et les Hellènes de la ville : ils se vantaient de leur descendance phénicienne ; ils durent mettre à la mode les produits, les usages, les sciences et les arts de la race supérieure, « divine », dont ils se proclamaient les fils ; peut-être usaient-ils eux-mêmes de la « langue des dieux », comme dit le Poète ; peut-être dressaient-ils leurs enfants et se délectaient-ils eux-mêmes à la lecture des écrits phéniciens qui, d’ailleurs, pouvaient leur être d’un très grand profit.

Si l’on prend pour la fondation de Milet la date d’Ératosthène, — 1044 av. J.-C., — et si

  1. Cf. les fondachi des villes levantines au Moyen-Age. « Les concessions, accordées dans les villes aux colonies des républiques commerçantes de l’Occident, se composaient soit d’un terrain à bâtir, soit d’un certain nombre de maisons, d’une rue entière ou d’une partie considérable de la ville. L’ensemble des propriétés d’une nation commerçante était désignée sous le nom de ruga ou vicus de telle ou telle nation. On y avait un vaste entrepôt, fundicum, fundicium. Les besoins religieux n’étaient jamais négligés : on dédiait les églises au saint patron de la mère patrie. Nous trouvons pour les Vénitiens des églises de Saint-Marc à Tyr, à Acre et à Béryte ». W. Heyd, Commerce au Levant (trad. Raynaud) I, p. 152-153.