Nous savons, d’ailleurs, que ces villes de Sicile avaient eu de très bonne heure leurs historiens : Hippys de Rhégium, contemporain des guerres médiques, avait composé un ouvrage sur la colonisation de l’Italie et cinq livres de Sikelika. Thucydide, qui put en faire usage, nous apprend qu’avant Syracuse, d’autres points de la côte sicilienne avaient été occupés par les Hellènes : Naxos, le premier de ces établissements, avait été fondée un an auparavant. C’est donc vers les années 735 ou 736 av. J.-C. que les Hellènes s’établirent au détroit de Sicile.
Les Récits, qui nous parlent de l’« Ile du Trident », et non pas de l’Ile du Triangle, sont sûrement antérieurs à cette date, et contemporains des siècles où « les Phéniciens, — nous dit Thucydide, — occupaient les promontoires et les îlots parasitaires sur tout le pourtour de la Sicile ».
Du jour où les Hellènes eurent connu, puis occupé ces rivages siciliens, le nom d’Ile du Trident ne pouvait plus venir à l’esprit de personne. Du jour où ils eurent vu, de leurs yeux vu, Charybde et Skylla, il fut impossible qu’un poète pût leur raconter les effroyables périls des Deux Écueils : les navigateurs grecs étaient en situation et en disposition de ne plus accepter ces inventions terrifiantes. Ils auraient tenu au conteur le langage que Thucydide tiendra plus