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explications dites poétiques, on peut, sur les cartes marines, avec l’aide des Instructions nautiques et des voyageurs, constater la véracité de toutes ces descriptions. Les Récits chez Alkinoos nous rendent, en fin de compte, une galerie de tableaux géographiques, et non pas, — le mot est encore de Strabon, — un musée de « tératologies ».

Mais ces tableaux ne sont pas dessinés à la mode des géographes « terriens ». Ils trahissent la main des navigateurs, par la vision même qu’ils supposent des réalités.

Ithaque, dit le Poète, est une « île basse ». Les montagnes d’Ithaque dépassent 600 et 800 mètres d’altitude et l’île n’a de plainettes qu’au haut de ses plateaux aériens. Mais, vue sur l’horizon marin ou sur l’écran de Céphalonie, — l’île Élevée, Samos, disaient les premiers navigateurs ; l’île de la Cime ou de la Tête, Képhallénia, traduisirent les Hellènes, — Ithaque n’est en effet qu’une butte sans grandeur : les 1.600 mètres de son altière voisine la couvrent de leur ombre… Les seuls navigateurs voient une « île de Circé » dans le « Monte Circeo » des terriens… L’ancienne ville de Campanie, Cume-Hypérie, n’est une « Hauteur » que pour les étrangers débarqués à la plage : les terriens des Yeux Ronds, qui la dominent, n’y voient qu’une colline basse.