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dans du vinaigre. C’est une plante arbustive, dont les feuilles seulement et les jeunes pousses sont comestibles. La fleur est d’un jaune laiteux, — « blanc de lait », dit le Poète.

D’autre part, l’Ile de l’Épervière, — Nèsos Kirkès en grec, — est aussi dénommée par lui Ai-aié : en hébreu ai ou i signifie île et aia signifie épervière. Il faut noter l’étroite correspondance de ces deux termes : le mot sémitique a été traduit en grec avec une fidélité scrupuleuse, littérale et jusqu’aux moindres nuances. En grec, le féminin « épervière », kirké, est à peu près inusité : les auteurs emploient le masculin kirkos pour les deux genres ; le seul article, masculin ou féminin suivant les cas, sert à distinguer le mâle et la femelle. En hébreu, au contraire, le seul féminin aia est usité pour les deux sexes ; les Hébreux, qui employaient ce féminin aia comme nom propre, l’appliquaient même à des hommes.

De cette traduction littérale, ne doit-on pas conclure que le Poète a tiré d’un modèle sémitique les noms de lieu et la description exacte de cette côte où ni lui-même ni ses compatriotes n’avaient encore pénétré, où des Hellènes ne devaient venir que cent ou deux cents ans plus tard ?