Les Sémites, avant les Grecs, connaissaient donc cette nourriture de vie et cette boisson de vie, qui confèrent l’immortalité : ce que l’Égypte ne pouvait pas fournir au poète odysséen, il le trouvait dans les contes et rites de Syrie ou de Chaldée.
Il a emprunté à ces Sémites deux des termes les plus importants de son texte : ni le nom des phoques, ni celui du zéphyr ne peut être expliqué par une étymologie grecque ; l’un et l’autre sont d’origine sémitique. Dans le texte homérique, le zéphyr, zephuros, est le vent « qui hurle sur la mer », comme notre mistral ; l’épithète de « hurleur » lui est réservée : c’est le sens de la racine sémitique z.ph.r… Les phoques, phokai, arrivent sur leurs « pieds nageurs » : la racine hébraïque p.ou.k signifie boiter, chanceler, dandiner.
Notre conte odysséen présente donc un mélange de choses égyptiennes et de choses sémitiques, ce qui proprement est le caractère des productions phéniciennes : Hérodote nous dit que les vaisseaux phéniciens apportaient en Grèce des chargements mi-partie égyptiens, mi-partie assyriens ; un pareil mélange caractérise le style des monuments que les archéologues rapportent aux Phéniciens.
Mais si la Phénicie avait emprunté à l’Égypte la mode littéraire des contes magiques, elle