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chure qui lui avait été envoyée de la prison de Ham. Le futur empereur Napoléon III lui répond :

« Fort de Ham, 18 octobre 1842. »

« Monsieur, la lettre que vous avez bien voulu m’écrire est venue faire trêve à mes chagrins et me réjouir le cœur. J’ai été vivement ému, en voyant l’écriture de l’homme populaire qui célébra en sublimes chansons les gloires et les malheurs de la patrie. Votre nom a rappelé à ma mémoire les douces émotions de mon enfance, alors qu’en famille nous récitions, mon frère et moi, devant ma mère attendrie, ces vers si beaux qui, s’élevant à toute la hauteur de votre génie, retombaient comme une massue sur la tête des oppresseurs.

« Je suis heureux d’apprendre que mes derniers écrits aient mérité votre approbation. Je n’aurai pas encore trop à me plaindre du sort, si je parviens à prouver que j’étais digne du lieu et du pays où je suis né, et si je m’attire dans ma captivité l’estime et la sympathie des hommes comme vous qui savent par eux-mêmes que le malheur n’est pas plus un crime que la fortune n’est une vertu. »

Tels étaient les témoignages de l’estime publique que les princes venaient offrir au républicain Béranger, retiré du monde. Un jour, un inconnu lui écrivit une lettre d’une tout autre nature. Impatienté par une gloire si populaire et voulant par avance faire sentir au poëte l’âpreté des coups que l’envie devait porter plus tard à sa mémoire, un jeune homme osa (en 1843) l’injurier jusqu’auprès de son foyer. La réponse de Béranger est si belle, que tous ceux qui, en tout temps, voudraient prendre sa défense, n’ont qu’à la faire lire aux esprits frivoles et aux envieux.

« Vous avez cent fois raison, monsieur ; mais c’est contre