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Lointier, pour leur donner son avis, se rappelle encore bien quelle fut la satisfaction qu’éprouvèrent, en rencontrant ce messager, et M. Thiers et M. Mignet, et ceux qui sortaient alors des bureaux du National. Il semblait que l’oracle eût parlé et qu’il n’y eût plus qu’à faire comme il avait dit.

Béranger est donc bien le préparateur principal et aussi l’un des principaux acteurs de la Révolution de 1830. Il croyait qu’on allait aisément, comme l’a dit sa chanson de 1830 même[1],

..........faire
        Du grand et du neuf,
Même étendre un peu la sphère
     De quatre-vingt-neuf.

Son admirable Correspondance, qu’il suffira un jour d’analyser pour écrire, en y joignant quelques pages, l’histoire de sa noble et utile existence, contient diverses lettres qui montrent bien dans quel sens et avec quels désirs il avait agi. Il écrit le 31 juillet « Je ne suis pas orléaniste, et vos amis paraissent disposés à me donner ce nom. Je n’ai le courage d’imposer mes calculs à personne. S’il me fallait diriger un seul homme, surtout s’il était jeune, je ne l’oserais faire dans un pareil moment. Je ne puis rien, je n’ai rien fait : le danger a cessé ; je vais partir pour la campagne. Je ne veux pas être en désaccord avec ceux que j’aime et que j’estime, et je n’ai pas l’ambition de les mener. Ce n’est pas l’égoïsme qui me fait parler ainsi, c’est le sentiment de mon inutilité. »

Et il dit vrai, car, le 16 août, il est allé de nouveau s’établir dans un petit pavillon du village de Bagneux, d’où l’avait fait descendre le 27 juillet le bruit de la première fusillade. Le 19 août il écrit à un ami : « Je n’ai pas de titre pour apostiller

  1. Voyez la Correspondance, t. II, p. 38.