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Mes jeunes amis les républicains, trompés également sur ma capacité et cherchant une garantie pour leurs principes, voulaient aussi que je tendisse la main à quelque portefeuille. « Quel ministère voulez-vous qu’on me donne ? — Celui de l’instruction publique. — Soit ! une fois là, je fais adopter mes chansons comme livre d’étude dans les pensionnats de demoiselles. » Et, à ces mots, mes jeunes amis de rire eux-mêmes de leur folle idée[1].

Le nouveau gouvernement me fit faire les offres les plus honorables ; mais je les repoussai, n’étant pas de ceux que tentent les sinécures ; car un travail obligé ne pouvait plus me convenir et j’aurais rougi, ayant assez pour vivre du produit de mes petits volumes, de puiser des pensions dans le coffre que la nation se fatigue à remplir chaque année. Je tiens surtout à l’honneur de n’avoir jamais été à charge à mes concitoyens, et la preuve que ce n’est pas par puritanisme, fausse vertu qui m’irait si peu, c’est que, comme je l’ai déjà dit, je n’ai jamais hésité, même depuis 1830, à recourir à la bourse de ceux de mes amis riches[2] qui n’étaient pas des personnages politiques.

  1. Ceux qui, en diverses circonstances, ont blâmé Béranger de sa persistance à ne vouloir d’aucun emploi public l’auraient blâmé bien plus encore s’il en avait accepté un.
  2. Entre autres M. Declercq, qui aida Béranger à faire du bien.