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d’enseignement à ceux qui suivent la carrière que j’ai quittée à cinquante-trois ans.

Constamment lié avec les principaux chefs du parti libéral, j’ai contribué comme eux et plus que beaucoup d’entre eux aux événements de la Révolution de juillet 1830. Après le triomphe du principe populaire[1] sur le principe légitimiste, je crus mon rôle terminé, ma tâche remplie. Il me sembla qu’un temps de repos était nécessaire à la nation pour juger son œuvre ; et, quant aux hommes que le pouvoir allait enivrer ou étourdir au moins, je reconnus, dès les premiers jours, que je n’avais rien à faire auprès d’eux. J’allai les attendre dans la retraite, où plusieurs ne pouvaient manquer de me venir retrouver bientôt.

Beaucoup de mes amis auraient désiré que j’aspirasse aussi aux honneurs du pouvoir. En laissant de côté l’obstacle du cens, que je ne puis payer, pareille prétention n’allait pas à un homme qui a su de bonne heure reconnaître ce qu’il y a de faiblesse dans son caractère et avouer ce qu’il y a de superficiel dans son instruction. Le pouvoir est un instru-

  1. Le rôle de Béranger est expliqué tout entier par cette courte phrase. Il est de ceux qui ont pensé que 1789 a inauguré une ère nouvelle et que la Restauration de 1814, imposée par l’ennemi, était la négation de la révolution de 1789. L’histoire de France lui a donné raison. Rien ne peut durer chez nous que ce qui relève de 1789.