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prix de tous les combats que j’avais livrés en faveur de la révolution littéraire qu’eux et leurs amis avaient osé tenter et qui n’était, à tout prendre, qu’une conséquence un peu tardive de la révolution politique et sociale. La tendance rétrograde de quelques-unes des idées de cette école, repoussée longtemps par nos libéraux vieux et jeunes, ne m’avait pas empêché d’applaudir au génie éminemment lyrique de Hugo et d’admirer les Méditations de Lamartine[1], avec qui je ne me liai que beaucoup plus tard[2]. J’avais su un gré infini à M. de Vigny[3] de composer ses sujets avec autant d’art que de goût, talent peu commun parmi nous. Je compris toute l’étendue et toute la finesse de l’esprit de Sainte-Beuve, et, avec tout le monde, je prophétisai à Dumas de grands succès dramatiques.

En vain on m’objectait que cette école avait failli souvent à la pensée démocratique qui lui avait livré carrière, que de son sein étaient sorties des insultes à notre gloire ; qu’on y avait outragé Napoléon mourant à Sainte-Hélène, qu’on y méconnaissait les services rendus par la philosophie, toutes choses qui devaient me blesser plus que personne. « Mais, ré-

  1. Marie-Louis-Alphonse Prat de Lamartine, né à Mâcon, le 21 octobre 1790.
  2. En 1843.
  3. Alfred-Victor de Vigny, né à Loches, le 27 mars 1799.