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manière, contre une fusion (c’était le mot du moment) qui égarait l’opinion publique et pouvait servir à l’affermissement du principe légitimiste. J’avais acquis alors assez d’influence pour espérer que ma tentative ne serait pas sans quelque succès. Le volume fit scandale, surtout dans les rangs de la haute opposition, dont plusieurs chefs, qui se croyaient près de devenir ministres, me maudissaient de loin, sans oser cesser de me tendre la main quand ils me rencontraient. Si, en effet, je n’ai pas chansonné ces prétendus grands politiques, j’avais un esprit dont ils redoutaient la piqûre. Il faut être armé de toutes pièces dans le métier que je faisais, et au besoin l’épigramme et les mots acérés ne me manquaient pas. C’était un de mes défauts de jeunesse que je n’ai jamais bien pu corriger. Ma gaieté communicative assurant le succès de mes plaisanteries, celles-ci, dans certain monde, n’ont peut-être pas été moins utiles à la cause populaire que mes chansons.

Sûr d’être déféré aux tribunaux pour ce quatrième volume, qui faisait faire de si grandes moues à tant de mes amis, je courus faire une visite à l’excellent Dupont (de l’Eure), et, pour m’approvisionner d’air, je voulus passer seul quelques jours au bord de la mer. J’appris, au Havre[1], le commencement des

  1. Le quatrième recueil fut saisi le 15 octobre 1828. Il avait paru à la fois in-8o et in-18.